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Publié en 1910, sous le titre anglais d’Howards End, Le legs deMrs. Wilcox est le quatrième roman de Forster. Situé dans l’Angleterredu tout début du xxe siècle, qui est encore celle de l’Empire britanniqueet déjà celle des débuts de l’automobile, le roman, à travers l’histoiredes deux sœurs Margaret et Hélène Schlegel, fait se rencontrer, nonsans heurts, trois familles qui représentent trois catégories socialesde l’Angleterre. Les sœurs Schlegel, filles d’un émigré allemand,représentent une grande bourgeoisie « cosmopolite », cultivée et« libérale » au sens anglais du terme, c’est-à-dire « de gauche »,préoccupée par la question sociale et les droits des femmes ; lesmembres de la famille Wilcox, rencontrée au cours d’un voyage enAllemagne, sont, quant à eux, des industriels, parfaits représentants del’Empire et du « libéralisme » britannique ; tandis que Leonard Bast,mal marié à la peu recommandable et pitoyable Jackie, est un petitemployé londonien qui aspire à la culture sans en avoir les moyens.Avec plus de maestria encore que dans les romans précédents, Forsterparvient merveilleusement à allier la comédie (et même la satire) socialeà son désir de poser dans le roman, à travers ses personnages, la questionde la réalité, qui ne s’atteint que dans l’accomplissement intégral de soi.Virginia Woolf écrit à ce propos : « À nouveau, mais sur un terrain debataille plus vaste, se poursuit le combat que l’on trouve dans tous lesromans de Forster — le combat entre les choses qui importent et cellesqui n’ont pas d’importance, entre la réalité et les faux-semblants, entrela vérité et le mensonge. » Il faudra non seulement toute la patience deMargaret Schlegel, mais aussi la violence des événements, pour que sondésir de « mettre du lien » entre les choses et les êtres (« relier suffit » estla devise du roman), qu’elle met en pratique en épousant Mr. Wilcox,finisse — comme dans Le plus long des voyages — par aboutir à uneharmonie retrouvée, loin de la trop moderne Londres : les trois famillesse réuniront enfin en la personne de Tom, le fils adultère d’Hélène et deLéonard, à Howards End, dans la maison de campagne que la vieilleMrs. Wilcox avait souhaité léguer aux Schlegel.Le livre fut un immense succès public dès sa parution. Mais, commel’a très bien noté David Lodge dans sa préface à l’édition Penguin duroman, en 2000, s’il dépeint avec une parfaite exactitude l’Angleterred’avant la Première Guerre mondiale, sa manière de mener le débatentre les valeurs de « l’intelligentsia de gauche » que l’on pourraitqualifier « anachroniquement » d’écologiste, représentée dans le livrepar la famille Schlegel, et celles de la bourgeoisie capitaliste reste d’uneétonnante actualité. Il a été adapté avec succès au cinéma en 1992 sousle titre Retour à Howards End par James Ivory, avec Vanessa Redgrave,Emma Thompson et Anthony Hopkins.